Chronique|

Une deuxième dose qui fatigue

[L’effet placebo] n’est pas un effet imaginaire, c’est très fort! C’est merveilleux! » convient le pharmacien et président-directeur général de Q & T Recherche, Pierre Gervais.

CHRONIQUE / Pendant que mes amis qui travaillent dans le milieu de la santé se font injecter « le vrai » vaccin contre la COVID-19, j’ai pour ma part reçu ma deuxième dose du candidat-vaccin Medicago.


Cette fois-ci, la douleur à mon point d’injection a persisté plus longtemps. Et a été plus forte. Assez pour m’empêcher de dormir sur mon côté droit durant quelques jours. J’ai été vacciné lundi et en écrivant ces lignes jeudi, je ressens encore de la douleur. 

De plus, contrairement à la première fois, j’ai senti une enflure autour du site d’injection. 

J’ai également ressenti de la fatigue. Plus qu’à l’habitude, du moins. Pas assez fatigué pour ne pas être fonctionnel, mais assez pour être lunatique. Comme si j’avais dormi quatre heures, même si ma nuit a été normale. 

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Peut-être suis-je fou, mais je suis très heureux de constater de tels effets secondaires. Dans ma tête, c’est une preuve que j’ai eu le vrai vaccin. Rappelons qu’en phase II, cinq volontaires sur six reçoivent le candidat-vaccin, tandis qu’un sur six reçoit un placebo. 

Mais attention, je ne peux pas partir en peur et aller fêter ça avec mes amis demain soir. Premièrement parce que mes amis ne sont pas vaccinés et deuxièmement à cause de l’effet placebo qui peut jouer de vilains tours à ceux qui pensent être immunisés. 

Donc la simple solution d’eau saline peut créer des effets secondaires comme la fièvre, l’enflure, le mal de tête, etc. « Ce n’est pas un effet imaginaire, c’est très fort! C’est merveilleux! » convient le pharmacien et président directeur général de Q & T Recherche, Pierre Gervais.

L’importance du placebo

Aussi merveilleux soit-il, plusieurs me posent des questions quant à l’importance d’un placebo. Selon Pierre Gervais, les volontaires qui reçoivent le placebo sont des comparatifs. 

« Si je dis que je roule à 70 km/h. En réalité, ça ne dit pas grand-chose. Il faut le comparer à quelque chose. Si je roule à 70 km/h sur l’autoroute et qu’il fait beau, je ne roule pas vite. Si je roule à 70 km/h sur la rue King à l’heure de pointe, c'est vite. J’utilise un indicateur qui nous donne un comparateur. Ça nous permet de dire que ce n’est pas vite ou que c’est une vitesse de fous », image-t-il.

« En sciences, on a la même chose, poursuit-il. On utilise un comparateur. Le meilleur comparateur qu’on peut avoir, c’est un placebo. Ça nous permet d’utiliser le moins de participants possible pour avoir notre réponse. La réponse, c’est que le produit est bon ou n’est pas bon. »

Comparer un produit est possible. Mais plus de participants sont nécessaires. « Pour conclure que le produit n’est pas bon, j’ai besoin de 2000 participants, car je le compare à un produit actif, plutôt que 600 participants, car je le compare à un placebo, ça veut dire que j’ai exposé 1400 participants à un risque inutile, car j’aurais pu avoir ma réponse avec 600 participants », explique-t-il, ajoutant qu’il comprend cependant les participants qui ne trouvent pas « le fun » à recevoir un placebo. 

Donc les porteurs du placebo ne sont pas moins importants que ceux qui ont reçu le vrai candidat-vaccin, ce qui me réconcilie avec le fait de, peut-être, avoir reçu un placebo.