Chronique|

Plus prudent que permissif

ÉDITORIAL / En annonçant quelques mesures d’assouplissement en prévision de la semaine de relâche, le gouvernement de François Legault a fait le choix de la prudence. Et c’est le choix qui s’imposait compte tenu de la fragilité des progrès réalisés au cours des dernières semaines.


Après avoir fait le choix de maintenir la semaine de relâche pour donner un peu de répit aux jeunes et aux enseignants, François Legault a voulu élargir le spectre d’activités qu’il sera possible de faire, notamment en famille. C’est, à toutes fins utiles, l’objectif de son point de presse de mardi.

En somme, peu de choses changent. Les assouplissements très modérés concernent principalement les loisirs et touchent les régions au niveau d’alerte rouge: réouverture des cinémas, réouverture de certaines infrastructures sportives intérieures (piscines et patinoires) pour la pratique individuelle ou familiale, augmentation (de 4 à 8) du nombre de personnes pouvant pratiquer une activité extérieure ensemble...

Pour le reste, le couvre-feu est maintenu à 20 heures en zone rouge. Cela vient évidemment mettre un bémol à la soupape donnée aux cinémas, notamment. Pour respecter le couvre-feu, il sera difficile d’avoir des représentations passé 18 h. Cela vient aussi expliquer, du moins en partie, pourquoi on n’a pas inclus les théâtres et les salles de concert dans le petit plan de réouverture proposé mardi.

La réouverture des cinémas est d’ailleurs conditionnelle au port du masque de procédure, à l’établissement d’une capacité d’accueil maximale et, surtout, de l’abandon de l’offre de restauration. Privés des revenus normalement générés par la vente de boissons, de nourriture ou de friandises, plusieurs propriétaires de salles pourraient bien être tentés de ne pas rouvrir.

Au fond, le gouvernement a voulu donner un peu d’oxygène aux familles qui chercheront des activités à faire pendant la semaine de relâche. Avec les musées et les bibliothèques déjà rouverts, on ajoute des activités sportives et de divertissement. Sans trop savoir, encore, si ces permissions se prolongeront une fois la relâche terminée.

L’heure était à la prudence et non au laxisme. On ne veut pas revivre les opérations de marche arrière, les valses-hésitations ou le jeu de yo-yo qu’on a connus au cours des derniers mois.

C’est sans doute ce qui explique, aussi, qu’une région comme la nôtre demeure au niveau d’alerte rouge. Sur la carte des couleurs, seule la région de l’Outaouais passe du rouge à l’orange.

Ce n’est pas vraiment étonnant et c’est sans doute très bien ainsi. D’abord, la situation géographique de la Mauricie et du Centre-du-Québec, régions centrales coincées entre la métropole et la capitale, n’est pas un facteur facilitant le changement de couleur. Dans la mesure où on cherche à limiter la circulation des Québécois d’une région à l’autre, il importe d’avoir une certaine cohésion territoriale.

Ensuite, il faut tenir compte du fait que même si les plus récents indicateurs sont encourageants pour la région sociosanitaire de la Mauricie et du Centre-du-Québec, la situation demeure fragile. Le réseau de la santé est toujours sous le coup des opérations de délestage. Ajoutons à cela le fait qu’on ne vaccine pas au rythme auquel on le souhaiterait, en raison des problèmes d’approvisionnement en doses de vaccins, et la menace que constitue l’apparition de nouveaux variants du virus, et on comprend la prudence du gouvernement et des autorités de santé publique.

Dans les faits, les statistiques de l’Outaouais étaient meilleures que celles de la Mauricie et du Centre-du-Québec et elles étaient surtout plus stables depuis plus longtemps. Le nombre de cas actifs en Outaouais est de 124, alors qu’il est toujours de 262 en Mauricie et au Centre-du-Québec. Entre le 7 et le 13 février, on a enregistré 167 nouveaux cas chez nous alors que l’Outaouais n’en comptait que 97 de plus. Mais surtout, l’Outaouais n’est pas centrale et elle est connectée sur l’Ontario, ce qui implique un minimum d’harmonisation des mesures en vigueur, surtout dans la région de la capitale.

Et même s’il peut être frustrant pour certains de voir des régions déjà au niveau d’alerte orange et une autre qui y passera prochainement, il ne faut pas oublier que c’est 85 % de la population du Québec qui est en zone rouge.

Ceci dit, les statistiques sont encourageantes pour la Mauricie et le Centre-du-Québec. Mardi, le dernier bilan faisait état de douze nouveaux cas, ce qui porte à trois le nombre de journées consécutives où ce nombre est inférieur à vingt. Le nombre d’hospitalisations reliées à la COVID-19 a aussi diminué à quatre. Et on ne compte plus qu’un seul patient aux soins intensifs.

Mais comme partout ailleurs, on craint l’impact que pourraient avoir les nouveaux variants du virus. On ne veut surtout pas vivre de nouvelles éclosions qui seraient attribuables à la présence de ces variants. À Terre-Neuve-et-Labrador, c’est le variant britannique qui est responsable de l’éclosion qui a fait passer le nombre de cas actifs de 16 à 297 en une semaine.

De telles situations donnent froid dans le dos quand on voudrait se féliciter des progrès qui sont timidement réalisés, ici, depuis quelques semaines.

Alors l’heure n’était pas à la magnanimité ou aux largesses. La prudence est encore très tendance en 2021, on dirait.