Mordu de hockey... et grand-père d'un joueur étoile

Origène Labrecque

Section 13, sièges 25 et 26. Durant plus de 25 ans, c’est à partir de cet endroit précis que le Sherbrookois Origène Labrecque et sa femme Henriette Brochu ont vu à l’œuvre les anciens Castors, les Jets, le Canadien de Sherbrooke, les Faucons et les nouveaux Castors au Palais des sports. De vrais mordus de hockey qui rataient aussi rarement les parties de leurs petits-fils, ignorant alors que l’un d’entre eux deviendrait un jour une vedette dans la Ligue nationale de hockey. Son nom : David Perron. 


Le grand-père du joueur des Blues de St Louis se trouvait aux premières loges pour voir son petit-fils gravir les échelons un à un. Si David Perron disputait une partie, Origène Labrecque et sa conjointe, aujourd’hui décédée, ne se trouvaient pas très loin. Et ce, allant jusqu’à servir de taxi à l’occasion. 

« Je lui donnais des conseils dans l’auto, mais il ne répondait pas souvent. Je pense tout de même qu’il les prenait! » lance l’homme de 90 ans, encore en grande forme malgré son âge.

« Je commence à avoir un peu de misère avec ma mémoire, mais je vais toujours conserver de bons souvenirs de nos journées passées à l’aréna, poursuit Origène Labrecque, surnommé « Zou » pour les intimes. David a commencé à jouer au hockey à l’âge de cinq ans et on le suivait déjà partout. Ce que les gens ne savent peut-être pas, c’est que son frère aîné Pascal était un aussi bon joueur que David. Il aurait pu percer lui aussi. Il était d’ailleurs un meilleur patineur que David, mais David avait tout un caractère. C’est d’ailleurs ce qui l’a mené jusqu’à la LNH. David n’a jamais mis les freins et n’avait qu’un seul objectif en tête : jouer dans la Ligue nationale. »

David Perron a pu célébrer la conquête de la Coupe Stanley avec son grand-père Origène Labrecque. 

Affronter Jean Béliveau

Cette passion pour le hockey ne date pas d’hier. 

D’ailleurs, il ne l’avouera jamais, mais les rumeurs racontent qu’il était tout un joueur de hockey.

« N’écris pas ça dans le journal. Sinon, mets-en pas trop! » a-t-il lancé bien humblement lors de l’interview. 

À l’âge de 16 ans, Origène Labrecque évoluait déjà dans la Ligue industrielle de Richmond et tentait ensuite sa chance avec les Tigres de Victoriaville, dans l’ancienne Ligue de hockey junior majeur du Québec.

« En 1947-1948, c’était le club de Jean Béliveau. Ça m’est aussi arrivé de l’affronter. Il n’y avait pas beaucoup d’équipes de haut calibre à l’époque, mais il y avait beaucoup de joueurs qui espéraient faire partie de ces équipes. Même dans la Ligue nationale, il n’y avait que six clubs dans ce temps-là! Ce n’était pas comme aujourd’hui. »

Retranché par la formation de Victoriaville après avoir été blessé par un coup de bâton à la tête, M. Labrecque a poursuivi sa carrière de hockeyeur à Kingsey Falls. 

« Je n’avais pas d’argent pour me déplacer et pour tenter ma chance auprès des gros clubs par la suite. Je me suis finalement rendu à La Patrie pour ensuite déménager à Sherbrooke en 1973. C’est à ce moment que Henriette et moi, on a commencé à acheter nos billets de saison au Palais des sports. Les gens savaient où nous trouver : pendant 26 ans, on a eu notre place dans la section 13, peu importe l’équipe qui se trouvait sur la glace. Mais quand le hockey senior a remplacé le junior majeur, on a décroché. J’ai assisté à une partie et je me suis levé pour quitter l’aréna. C’était trop violent. »

Grand partisan des Blues

Lorsque les Castors ont quitté Sherbrooke, le hasard a fait en sorte d’envoyer David Perron chez les MAINEiacs de Lewiston, là où l’ancien propriétaire de l’équipe, Mark Just, avait déménagé la franchise. 

« On est allés le voir jouer quelques fois à Lewiston même si ce n’était pas à côté. David avait travaillé très fort et avait traversé plusieurs épreuves avant d’atteindre les rangs du junior majeur. Plus jeune, ses entraîneurs l’accusaient de manger la rondelle et ils le retranchaient chaque fois. Pourtant, il finissait la saison avec le plus de buts, mais aussi, avec le plus de mentions d’aide. Mais David était un joueur de caractère et ne se laissait pas abattre par ça. On le voyait que David était trop fort peu importe où il jouait, même dans le junior AAA avec les Panthères de Saint-Jérôme après avoir joué midget B. On n’était donc pas surpris de le voir brûler les étapes pour atteindre rapidement la LNH. »

À l’âge de 19 ans, David Perron a fait le saut dans la grande ligue après être devenu un choix de première ronde des Blues. Perron a ensuite évolué dans quatre autres marchés pour finalement revenir à ses origines, dans la ville de St Louis. 

« Mon équipe préférée a changé souvent, mais je suis redevenu un grand fan des Blues », admet M. Labrecque en riant. 

Sa plus grande fierté?

« Le voir soulever la Coupe Stanley. Quand il l’a ramenée chez lui, j’étais là évidemment. Je n’aurais pas raté ce moment pour rien au monde. J’ai pu la voir de près. Ce qui a fait le succès de David dans la LNH, c’est sa fougue et son désir de gagner. David déteste perdre et ce jour-là, il pouvait se vanter d’être un champion de la Coupe Stanley! »

Puisque les parties des Blues sont rarement présentées à la télé sur les chaînes accessibles au Québec, Origène Labrecque doit bien souvent se contenter de regarder les sommaires. 

« Je me lève la nuit pour aller voir si son club a gagné. J’ai tenté d’ajouter la chaîne NHL Center Ice, mais elle n’est pas accessible avec Videotron et je ne suis pas très habile pour trouver les parties sur Internet. »

Malgré tout, rien n’échappe à M. Labrecque. 

« David joue probablement son meilleur hockey même s’il est âgé aujourd’hui de 32 ans. Je pense que tant qu’il évoluera avec Ryan O’Reilly, il connaîtra du succès. Les deux se complètent bien et O’Reilly a déjà confié à François, le père de David, qu’il adorait jouer avec lui et que les deux formaient la paire! »

Origène Labrecque espère d’ailleurs pouvoir revivre de grandes émotions en voyant son petit-fils gagner une deuxième Coupe Stanley. 

« Ils ont encore toute une équipe cette année. Ce n’est pas impossible! » espère-t-il.