Chronique|

La flamme olympique, ça se transmet

Liza rame toujours! Elle croît qu’être sur l’eau est l’endroit le plus magnifique au monde.

CHRONIQUE / Tout ce qui entoure les Jeux olympiques me donne des frissons.


Que de courage et de ténacité ça prend pour s’y rendre!

Voici l’histoire de trois vies olympiques, qui ont décidé de transmettre leur savoir après avoir vécu l’ivresse des Jeux.

Bouger pour préserver... la santé mentale

Kayakiste depuis l’âge de 7 ans, c’est au chalet familial à Lac-Sergent que Liza Racine a débuté le kayak de vitesse. Déjà athlétique à cet âge, elle fut très influencée par ses sœurs qui pratiquaient déjà ce sport.

Ce fut d’abord les petites régates régionales auxquelles elle participa avec beaucoup de succès. Avec les années, le calibre est bien sûr devenu plus compétitif, mais malheureusement les résultats n’étaient pas au rendez-vous tel que souhaité.

Malgré ce désir fort et ce plaisir de ramer, une lacune au point de vue spécificité d’entraînement à son club d’origine n’aidait pas à cette baisse de cette performance. Ce qui était le plus décevant et incompréhensible, c’était qu’elle excellait lors des entraînements. Les jours de compétitions, toutefois, tout semblait s’écrouler, donnant des performances sous le potentiel existant.

À l’âge de conduire, elle prit la déchirante décision de quitter son club, sa région, pour rejoindre un club de Montréal, afin d’y trouver un entraînement adapté à sa progression. Elle a d’ailleurs changé de club à plusieurs reprises, jusqu’à se rendre en Ontario. Malgré le fait qu’il lui était ardu de se sentir «chez elle» avec tous ces changements, elle se souvient majoritairement des amitiés créées pour la vie.

Le plus important: elle n’a jamais baissé les bras. Elle redoubla d’efforts, mit l’accent sur sa concentration. Pour réduire le stress, elle a lu des livres sur le sujet. Puis arriva sa rencontre avec un enseignant à l’Université Laval, Luc Nadeau, qui devint son mentor, l’outillant pour «ralentir son cerveau», car tout allait trop vite!

Elle fut récompensée par ce long cheminement, car elle s’est taillée une place sur l’équipe olympique comme réserviste, aux Jeux de Sydney (2000). «Malgré l’amertume de ne pas descendre le parcours, je me trouvais quand même hot de m’y être rendue, compte tenu de ces difficultés».

Maintenant, Liza comprend davantage son parcours! Elle a reçu, plusieurs années après ce rêve d’une vie, le diagnostic par un médecin spécialiste qu’elle souffrait du TDAH, ce qui venait envenimer son stress de performance.

Aujourd’hui, Liza ressent un sentiment de liberté et de compréhension face à tout ce qu’elle a vécu. Maintenant, elle sait! Elle est en paix avec elle-même! Et c’est une olympienne, qui transmet son vécu à la prochaine génération de rameurs.

Liza s’implique bénévolement auprès des jeunes athlètes du Club de canoë-kayak de Lac-Sergent. Détentrice d’un baccalauréat en éducation physique, elle travaille dans le milieu. Sa priorité avec les jeunes: leur apprendre le dépassement de soi, les écouter, l’éthique de travail, toutes des valeurs pour la vie.

D'entraineur à entrepreneur

Diplômé en sciences de l’activité, Alain Déraspe, ce Madelinot d’origine, est depuis 2004 enseignant au Cégep de Ste-Foy comme éducateur physique et très impliqué dans le monde du triathlon et des sports de plein air. Son amour pour les Jeux et ce rêve furent vécus en tant qu’entraîneur pour les mêmes Olympiques que Liza, ceux d’Australie en 2000.

Pour les entraîneurs et les athlètes au Québec, la précarité entourant le milieu du sport amateur a toujours existé. Alain, qui est devenu entraîneur du Club de triathlon de l’Université Laval en 1996, a dû rapidement s’approprier la gestion des ressources financières et humaines, se résumant pas mal à lui seul, pour combler les besoins et objectifs des quelque 90 athlètes amateurs et élites. En plus de ses connaissances acquises au niveau de ses études, en tant qu’athlète et entraîneur, il mentionne la chance qu’il a eu de croiser sur son parcours Jean-Marie DeKoninck et Denis Villeneuve, tous deux très expérimentés dans le milieu sportif et entrepreneurial, et qui l’ont guidé. En 2000, une opportunité se présente qu’il ne peut refuser: accompagner une athlète qui désire gravir les échelons vers une qualification olympique, Isabelle Turcotte-Baird. Tout comme l’athlète, une série d’obstacles le confrontera à chaque pas de plus vers cet objectif: difficultés financières, rareté de ressources pour peaufiner certains aspects, connaissances désuètes pour tenir à bout de bras cette grosse structure. Une seule flamme les unissait pour s’accrocher, soit vivre l’expérience olympique. Quelques semaines avant les Jeux, la triathlète obtient son laissez-passer. Alain est invité à se rendre à Sydney et sent sa présence nécessaire à ces Jeux, moyennant par contre tous les frais de transport, de logement, de vêtements de l’équipe canadienne, qui ont été payés à partir de ses propres économies ainsi que celles de son club et de certains supporteurs.

Alain qualifie cette expérience des JO d’unique et exaltante. Elle l’a conduit à une période de grands questionnements, mais qui a aussi servi de tremplin pour mieux rebondir!

Cette expérience fut plus grande que nature! «La vibe est inexplicable! La sécurité est irréprochable! J’ai vu gagner le premier triathlète de l’histoire des JO, j’ai accompagné Isabelle dans toute sa préparation. Ça m’a fait oublier toutes les embûches que nous avons frappées!»

À son retour, une certaine réalité le rattrape. Il perd la motivation, ce qui se produit à l’occasion après des moments grandioses. Devant la complexité de ses tâches, il se sentait soudainement seul et impuissant. S’ajoutait à sa réflexion une arthrite psoriasique qui, à certains moments, était un frein de plus à son quotidien. Sans regret, heureux de ce qu’il avait accompli, il était temps de passer à autre chose, après avoir pleinement vécu son rêve olympique.

Alain quitta son poste d’entraîneur en 2004, avec d’excellents souvenirs en tête. Depuis, il occupe un poste à temps plein au Cégep de Ste-Foy comme éducateur physique, où la flamme de promouvoir l’activité physique chez les jeunes l’habite toujours autant. De plus, il a développé un intérêt dans l’organisation d’événements sportifs et est un des instigateurs du Centre de vélo de montagne, fatbike, randonnée pédestre, Empire 47 à Lac-Delage.

La force d'une équipe, toute la vie

Afin de bouger avec ses amis de quartier, Marie-Ève Nault baigna dans l’acquisition d’une multitude d’habilités sportives dès son jeune âge. La Trifluvienne avait déjà en mire d’aller à «ces Jeux Olympiques». Peu importe le sport, elle voulait s’y rendre. Toute petite, elle regardait les anneaux olympiques avec ses petits yeux brillants d’enfant.

Née d’un père hockeyeur et d’une mère qui adorait les sports, elle a vite appris à botter des ballons avec aisance. Le déclic pour le soccer se fera rapidement! Sa détermination d’évoluer au sein de ce sport s’est davantage concrétisée lorsque l’équipe nationale féminine de soccer a joué une partie au centre Claude Robillard. Elle a obtenu à ce moment-là la signature de Luce Mongrain, joueuse de l’équipe qui l’a encouragée à suivre ses ambitions. Ce fut la confirmation de tout! Après à peine un an au Cégep de Trois-Rivières avec les Diablos, elle a décroché une bourse à l’Université du Tennessee en soccer, dans le programme d’éducation physique. Nullement bilingue, elle raconte à la blague qu’elle avait oublié cet aspect, soit d’étudier en langue seconde, car elle se concentrait à priori à «jouer au soccer». Elle s’estime privilégiée d’avoir pu rejoindre un programme où le travail passionné des entraîneurs et des spécialistes, jumelé à la dynamique incroyable entre les coéquipières, a fait la différence dans toute sa carrière. Sa bourse américaine ne l’a pas empêchée d’évoluer au sein de l’équipe canadienne, de participer à deux Coupes de monde, dont une au Canada en 2015.

Elle a atteint son rêve de petite fille en participant aux Jeux de Londres en 2012, malgré une fracture à la cheville cette même année, ainsi qu’à ceux de Rio en 2016 comme réserviste. «Mentalement, être là et prête pour les entraînements, donner ton maximum, en n’étant pas sur le terrain lors des Jeux, ce n’était pas toujours évident. On forme une équipe, on travaille en équipe! À Londres, une porte s’est ouverte: de nombreuses blessures m’ont permis d’avoir du temps de jeu. J’ai donc pu vivre le tournoi encore plus intensément».

Maintenant, avec son tatouage des anneaux olympiques gravés sur sa cheville blessée tout juste avant les Jeux, Marie-Ève ne conserve que de beaux souvenirs. Elle les partage avec les athlètes de la région de différentes façons et continue de vivre cette passion pour le sport en jouant avec des amis au soccer, toujours pour le plaisir.

Elle travaille à temps complet pour le CREEM (Centre régional d’entraînement et d’évènements de la Mauricie) qui vient en aide auprès des athlètes de la région. Elle est entraîneure à temps partiel pour le soccer féminin des Patriotes.

Ces trois olympiens possèdent en commun la passion de leur sport. Ils ont eu besoin de persévérance pour accomplir leur rêve. Ils sont maintenant au service de notre jeunesse, afin de redonner un peu de ce qu’ils ont reçu. Tous ceux qui les côtoient sont chanceux, à mon avis…

«Je peux tellement comprendre ce dont les athlètes ont réellement besoin. Avec les jeunes, je parle de persévérance et de dépassement de soi, qui sont des valeurs très importantes pour moi et qui me guident encore», raconte Marie-Ève Nault.